État de nature et mythe du bon sauvage

Une analyse du Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes, d’après Jean Jacques ROUSSEAU .

Le mythe du bon sauvage apparaît au XVIe siècle avec la découverte de l’Amérique, nourri par les récits des voyageurs et atteint son apothéose au XVIIIe siècle. Il hante les esprits de la Renaissance et obsède les hommes des Lumières. Rousseau en fait la pierre angulaire de ses 2 célèbres discours (Discours sur les sciences et les arts en 1750 et Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes en 1755) qui condamnent la dépravation de l’homme civilisé. Il fait l’hypothèse que l’humanité a dû connaître un âge plus heureux, proche de celui des peuples sauvages actuels : l’état de nature

L’Afrique et le bon sauvage tel qu’on les imaginait de façon idéalisée à la fin du XVIIIe siècle.

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  • La fabrication du mythe du bon sauvage : origines et rôle

Le mythe du bon sauvage s’est constitué entre le XVI et le XVIIIe siècle. Il puise ses racines dans le projet humaniste de la Renaissance qui place au centre de la création et de l’activité de la connaissance, l’homme être doué de raison et de pouvoirs immenses sur le monde.

Le bon sauvage n’est pas un être réel mais une fiction, une idée parfois abstraite, une image composite formée des visages que l’époque de Voltaire et de Rousseau prête à l’âge d’or, quand les hommes vivaient en harmonie avec la nature.

Ecrivains et philosophe se sont appuyés sur les récits des voyageurs -explorateurs (de Colomb à Cook en passant par Bougainville et La Pérouse) ou encore les missionnaires et marchands-, sans être témoins directs de la découverte et sans en vérifier l’exactitude, pour fabriquer un personnage. Ils accentuent certains traits et en éliminent d’autres.

La création du bon sauvage répond donc au besoin d’une image idéalisée de l’homme naturel pour exprimer le regret d’un âge d’or révolu, critiquer la société européenne et rêver de liberté et d’égalité sur le modèle plus ou moins imaginaire des sociétés sauvages

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Montaigne, précurseur du mythe du bon sauvage en France

Dans ses essais, Montaigne à travers son chapitre « Des cannibales », fait l’éloge des peuples caribéens vivant encore sous « les lois naturelles » ou dans « Des coches » il stigmatise la destruction de la haute civilisation aztèque et les massacres engendrés par notre cupidité.

Les Essais reviennent à plusieurs reprises sur les habitants d’Amérique qu’on appelle encore les Indes occidentales. D’abord au nom du relativisme culturel, pour faire voler en éclat l’idée que l’on se fait ici de la civilisation et de la barbarie et appeler à la tolérance. Il affirme que la culture « civilisée » ne détient pas toujours la vérité tandis que mode de vie et l’innocence des sauvages comme les Tupinamba apparaît plus pure que l’état social. Enfin, il dénonce les crimes inspirés par l’appétit de richesses du Nouveau Monde. Pour Montaigne pas de doute, la vie sauvage vaut mieux que la vie civilisée parce qu’elle est plus proche de la nature. 

Au XVIIIe siècle se développe un courant égalitariste. Le procédé littéraire qui consite à faire endosser par un sauvage (ou un étranger) la critique des mœurs occidentales connaît un bel essor. Montesquieu imagine des touristes persans à Paris (Lettres persanes, 1721), Voltaire fait débarquer un huron en Bretagne (L’ingénu, 1767).
Le mythe du bon sauvage, associé à la nostalgie d’un âge d’or naturel, conteste l’idée de progrès, produit et emblème de la civilisation européenne.

A côté de cette tradition qui fait du sauvage le fer de lance de la critique de notre société, un autre courant apparaît : celui des mœurs des sauvages américains.

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L’état de nature : la théorie de Rousseau pour expliquer l’inégalité

Un malentendu tenace fait de Jean-Jacques Rousseau, théoricien de l’état de nature, le plus grand chantre du bon sauvage au siècle des Lumières. Rousseau aura beau s’en défendre, ses adversaires (Voltaire en particulier) et ses partisans (les cohortes romantiques de la fin du siècle, plus rousseauistes que Rousseau lui-même!) s’accorderont pour promouvoir cette caricature.

En 1750, l’auteur de Genève devient tout à coup célèbre par son Discours sur les sciences et les arts. Répondant à une question de l’académie de Dijon, il a soutenu avec éclat que « les mœurs ont dégénéré chez tous les peuples du monde à mesure que le goût de l’étude et des lettres s’est étendu parmi eux. » Rousseau soutient que les peuples civilisés sont corrompus, affaiblis ou devenus méchants du fait du luxe dans lequel ils vivent et que leurs apparents progrès ne sont que les masques de leur esclavage : « (…) sans cesse on suit des usages, jamais son propre génie. » En d’autres termes : dans cette société du XVIIIe siècle qui s’enorgueillit d’être tellement civilisée, l’homme serait bien moins heureux que lorsqu’il demeurait solitaire au tréfonds des forêts. 

Bien que totalement en porte-à-faux avec l’optimisme intellectuel des Lumières qui lie bonheur et développement conquérant des sciences et des techniques, Rousseau est récompensé par l’Académie. Il devient une célébrité de la scène intellectuelle, bien que controversée.
La controverse fit rage, le texte de Rousseau étant reçu comme un pamphlet pratiquant l’art consommé du paradoxe.

Thèse du Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes

Cinq ans plus tard, en 1755, Rousseau se saisit d’une nouvelle question posée par l’Académie de Dijon : « Quelle est la source de l’inégalité parmi les hommes et si elle est autorisée par la loi naturelle ? », question abondamment traitée par la tradition philosophique (Locke, Hobbes, Grotius).

Rousseau formule plus précisément l’inégalité en ces termes : comment l’état de servitude actuel de l’humanité s’explique-t-il ? L’égalité originelle des hommes est un point dont tous conviennent, y compris les chrétiens. C’est l’origine de l’inégalité qui fait problème. Pour les chrétiens, l’inégalité résulte du pêché originel. Rousseau n’accuse ni Dieu ni la nature humaine, mais la société. 

Rousseau souligne à la fois ce qui rapproche, au sein d’une même nature, les animaux et les hommes, mais aussi ce qui les distingue. Au plan physique, l’homme sauvage, par sa nudité, son instinct de conservation, sa sensualité grossière, participe de l’état animal. En revanche par le côté métaphysique et moral, l’homme n’est plus une « machine » entre les mains de la nature : quand l’animal choisit et rejette « par instinct », l’homme agit par « un acte de liberté ». Cette liberté qui définit l’homme et qui fait de la condition de l’homme sauvage le contraire de celle de « l’homme domestique » (civilisé), est aussi ce qui peut le conduire à dégénérer « parce que l’esprit déprave les sens, et que la volonté parle encore, quand la nature se tait« .

Il construit donc par hypthèse, une histoire de l’humanité avant l’inégalité, c’est à dire essentiellement avant la propriété. Cette histoire s’organise autour de trois grandes phases :

– Dans l’état de nature, l’homme n’est encore qu’un animal sauvage et solitaire, une brute stupide dépourvue de langage, en deçà du bien et du mal.

– L’état sauvage (ou second état de nature) est l’âge idyllique, où le hommes chasseurs ou bergers, assurent seuls leur propre subsistance. C’est à cette époque radieuse et fugitive que sont consacrés les plus longues analyses du Discours sur l’origine de l’inégalité.

– Enfin, l’état social, inégalitaire et oppressif, apparaît avec l’agriculture qui requiert nécessairement propriété privée, police, Etat, argent, etc. L’aventure humaine est donc tragique : la socialisation fait le malheur de l’homme et en même temps sa grandeur puisqu’il devient conscient. Sa thèse est donc que l’institution de la société et de la propriété a conduit à la confiscation du pouvoir politique par les riches et donc aux inégalités. On trouve ainsi un écho du Huron Adario, Indien du Canada mis en scène par le baron de La Hontan, un des voyageurs et philosophes qui a le plus largement contribué au succès du mythe du bon sauvage dans ses Dialogues curieux entre l’auteur et un sauvage de bon sens (1703). En effet d’après lui les Hurons ne connaissent aucune des contraintes de la civilisation occidentale : ni la propriété « source de tous les désordres qui troublent la société des Européens » ou encore ni la subordination, qu’elle soit militaire ou civile contraire « aux sentiments de la nature« .

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De l’état de nature au nouveau Contrat social proposé par Rousseau

Rousseau ne propose pas de revenir en arrière vers cet âge d’or pour « marcher à quatre pattes », comme le moque Voltaire, car il sait l’histoire irréversible. L’issue que le philosophe propose est la « dénaturation » complète de l’homme au sein d’une société réformée : Du contrat social (1762) en définira les principes. Il y recherche les moyens de transformer l’homme et la société, moralement et politiquement, pour réconcilier sociabilité et liberté naturele.

Rousseau propose ainsi d’instaurer un nouveau pacte entre gouvernants et gouvernés, un contrat social et démocratique fondé sur le consentement et non sur la violence despotique : « Tout homme étant né libre et maître de lui-même, nul ne peut, sous quelque prétexte que ce puisse être, l’assujettir sans son aveu » (Du Contrat social, IV, 2, 1762).

Rousseau, père de la Révolution française ?

Il sera ainsi considéré comme père spirituel de la Révolution Française : Robespierre, Saint Just seront les plus fervents admirateurs du Contrat social, même s’il ne livre pas de doctrine.

Le refus d’idéalisation de la vie sauvage de Rousseau

Toutefois Rousseau est mal compris de ses contemporains. En effet, si comme Montaigne et d’autres, il refuse de « barbariser » les sauvages, il ne les idéalise pas non plus.
Vivant eux aussi en société, les sauvages se sont éloignés de la pure nature. Du reste, Rousseau est très conscient de la faiblesse de nos connaissances sur ces peuples. « Toute la terre est couverte de nations dont nous ne connaissons même pas les noms, et nous nous mêlons de juger le genre humain ! » Préoccupés de négoce ou de conversions, ceux qui voyagent sont en général de piètres observateurs.

Rousseau dessine le programme de ce qui deviendra l’ethnographie. Lévi-Strauss reprend d’ailleurs cette page dans un texte fondateur : « J.J Rousseau, fondateur des sciences de l’homme. »

Pendant près de 40 ans, tout le débat intellectuel va se focaliser autour de l’état de nature. Voltaire y intervient avec dérision et bon sens. Il caricature les idées de Rousseau (ex : le chapitre des Oreillons dans Candide).

Rousseau aura beau dire et répéter que l’état de nature n’est qu’une hypothèse, qu’il n’a peut-être jamais existé, un innombrable courant primitiviste (=l’idéalisation des « sauvages ») se réclame de lui. La fin du XVIIIe siècle sera l’âge d’or du mythe du bon sauvage : graveurs et peintres s’emparent avec engouement de l’éden exotique, de ce « paradis perdu et retrouvé » selon l’expression de Milton.

« Rousseau a nourri toutes les révolutions »

Tous les révolutionnaires se sont inspirés de Jean-Jacques Rousseau, explique Tanguy L’Aminot, dans un entretien publié dans le hors-série du Monde consacré au philosophe.

Issu d’un milieu modeste Jean-Jacques Rousseau s’est autant formé par l’expérience que par les livres. Cela explique en partie pourquoi la Révolution française a plus retenu son nom que ceux de Voltaire ou Diderot. Son œuvre est si riche et si subversive qu’aucun parti ne peut la saisir et la faire sienne, mais que tous peuvent s’en prévaloir. Tous les révolutionnaires s’en sont inspirés, explique Tanguy L’Aminot. Enfin le style de Rousseau est lui aussi très novateur parce qu’il mêle sa personne à ses idées, avec un souci de sincérité égal, dans sa pensée et dans sa vie. 

Cet entretien est tiré du numéro Hors-Série du Monde consacré à Jean-Jacques Rousseau.

Qu’est-ce que le nom de Rousseau évoque en 2012, année du tricentenaire de la naissance du philosophe, pour un honnête citoyen, au-delà des connaissances basiques, voire scolaires qu’il peut en avoir ?

Tanguy L’Aminot : Le nom évoque, à mon avis, pour le plus grand nombre la nature et l’écologie. Pour les plus politisés, la dimension politique reste vive sans doute. Pour les femmes, la première image qui surgit est celle du misogyne, du phallocrate. C’est cela la perception que peut en avoir le grand public aujourd’hui. Il y a également l’autobiographe, puisque c’est le thème proposé dans le cadre scolaire, avec Les Confessions et Les Rêveries.

Cette dimension de l’autobiographie renvoie à la fin de sa vie ou imprègne- t-elle toute son œuvre ?

Tanguy L’Aminot : Elle est présente à la fin de sa vie sans aucun doute, même s’il a produit quelques petits essais d’autobiographie auparavant. Il a eu en 1747 un projet de journal avec Diderot, Le Persifleur, dans lequel il se met en scène sous un jour léger, libertin presque, qui ne correspondra pas à ce qu’il est et à ce que sera sa vie. C’est un peu comme un jeu, mais c’est un texte de caractère autobiographique.

Dans quelle mesure est-il autodidacte ?

Tanguy L’Aminot : Oui, il se forme seul. Il en parle longuement dans Les Confessions, il dit qu’il a une éducation sur le tas. Son père est horloger, sa mère est morte après sa naissance, il est près de son père et lit les romans de sa mère à son père qui travaille dans son atelier.

Comment accède-t-il aux connaissances sur les arts, les sciences, la politique, l’économie, etc ?

Tanguy L’Aminot : Il y aura plusieurs étapes. La première que j’évoquais est celle de la découverte de la sensibilité à travers des romans précieux de la bibliothèque de sa mère avec La Calprenède ou Madeleine de Scudéry, c’est ce qu’il va lire en premier et qui va former sa sensibilité. « Je sentis avant de penser », dit-il. La deuxième intervient aux Charmettes, quand il est dans la maison louée par Mme de Warens ; c’est aussi une époque amoureuse pour Rousseau, mais pas seulement : il va passer l’hiver tout seul et ce n’est pas follement gai contrairement à ce qu’en dit une vision erronée de la vie de Rousseau. Donc, il passe l’hiver là, dévore la bibliothèque et va se faire ce qu’il appelle un « magasin d’idées » ; il va lire les grands philosophes de l’époque John Locke, Charles Rollin, Pierre Bayle, etc. Et il est assez doué pour effectuer ces lectures seul, c’est un peu cela aussi le génie de Rousseau.
Et puis il a une troisième phase dans sa formation : il va fréquenter des milieux très divers, contrairement aux philosophes de son époque qui viennent d’un même milieu, n’en sortent pas ou ne fréquentent que leurs collègues intellectuels. On parle du cosmopolitisme des philosophes, c’est vrai, mais c’est avant tout un cosmopolitisme mondain. Quand Diderot va en Russie, il y rencontre la noblesse russe et Voltaire de même quand il est en Prusse. Rousseau, issu d’un milieu populaire, va traverser des contrées sociales différentes et ne va pas rencontrer que l’élite. À Venise, il va fréquenter un monde interlope, fait d’espions ou de personnages singuliers, pas convenables selon les critères des gens bien.
La première fois qu’il arrive à Paris en 1731, il le raconte dans Les Confessions, il traverse le quartier de Saint Martin, le plus pauvre de Paris, et c’est la première image qu’il a de cette ville. Cette perception du monde va se retrouver dans son œuvre où il ne cessera d’évoquer les capitales qui ruinent un pays parce qu’elles attirent toutes les énergies et les richesses et appauvrissent les campagnes et les provinces. La formation de Rousseau, n’est pas simplement livresque, mais aussi faite d’expériences et de choses vues.

Quelle est la véritable relation de Jean-Jacques Rousseau avec les philosophes ?

Tanguy L’Aminot : Il n’est pas de leur clan. C’est surtout avec Diderot qu’il va bien s’entendre ; ils ont à peu près le même âge, Diderot est un peu plus jeune. Ils ont des projets en commun et s’entendent bien avant de devenir des frères ennemis. Et la détestation sera forte pour diverses raisons. Rousseau a gardé de ses origines genevoises certains traits de caractère. Sur le plan religieux il ne s’entend pas du tout avec les athées comme d’Holbach ; il n’apprécie pas les discours ou les plaisanteries du milieu encyclopédiste. Il reste sur sa réserve et même se fâche et menace de partir si l’on s’obstinait à blasphémer, lors d’un fameux banquet chez Mlle Quinault, en 1754. C’est le fondement et les raisons d’une rupture qui interviendra en 1756. Et le fait que Diderot et d’autres veulent intervenir dans son amour pour Sophie d’Houdetot, amie de Saint-Lambert, le choque. Ce milieu, cette ambiance, cette manière de vivre des philosophes gêne Rousseau, le calviniste. Cette morale qui se défait le détourne d’eux.

Comment s’élabore sa réflexion, et en quoi est-il subversif ?

Tanguy L’Aminot : La Révolution française a plus retenu le nom de Rousseau que ceux des philosophes. Pendant la révolution tous les groupes vont se réclamer de lui : les aristocrates, les contre révolutionnaires, les Bourgeois, les Girondins, les Montagnards, les Jacobins ou les Enragés même. Tous vont à un moment ou à un autre se référer à Rousseau ou l’invoquer pour attaquer les autres. Un pamphlet édité par un certain Lenormand, sous la révolution, s’appelait même Jean-Jacques Rousseau aristocrate.
Il est subversif parce que son œuvre est si forte qu’aucun parti ne peut la saisir et la faire sienne. Il peut juste y puiser. Rousseau ne propose pas une doctrine reposante que l’on peut ranger sur un rayonnage ou dans un livre une fois la lecture terminée, sans suite aucune. On ne s’étonnera pas qu’il ait également nourri les révolutions du monde entier : en Russie, en Pologne au XVIIIe siècle. En Amérique latine, il a influencé Simon Bolivar, le libérateur du continent sud américain. Mais également en Asie, au Japon à la fin du XIXe on découvre son importance. Il va toucher le mouvement socialiste et anarchiste japonais et cela va se répandre dans tous les pays proches parce que le Japon en est alors la puissance dominante. C’est Nakae Chômin qui l’a traduit et donné à comprendre. Sa traduction n’est pas simplement académique ; Rousseau est adapté, récupéré, détourné, trahi pour les besoins de causes, d’enjeux d’une époque, d’un pays. C’est en cela qu’il est vivant et toujours agissant. L’œuvre de Rousseau permet cet accaparement, et cela aussi c’est subversif.

L’extrême droite n’en a-t-elle pas fait un de ses auteurs de référence ?

Tanguy L’Aminot : C’est complexe : il a une authentique aura dans de nombreux milieux, même à l’extrême droite. Marcel Déat, un ancien socialiste, va écrire en 1942, pendant la guerre, un texte intitulé Jean-Jacques Rousseau totalitaire qui fait l’apologie d’un Rousseau socialiste et national et qui, écrit-il « s’inscrit parmi les précurseurs et les ancêtres de la révolution nationale, même si par ailleurs on le déteste ». À l’inverse d’un Maurras, issu d’une droite plus classique, qui rejette Rousseau en tant que précurseur de la Révolution française.

Comment qualifiez-vous son écriture ?

Tanguy L’Aminot : Il y a également une subversion de l’œuvre, du style, qui a donné naissance au romantisme. Rousseau va permettre l’adhésion du lecteur à son œuvre. Dès le début son éloquence est soulignée par tous ses opposants. Les royalistes Joseph de Maistre et Antoine de Rivarol se plaignent qu’il soit si talentueux, ce qui permet à sa pensée de se diffuser et de convaincre. Son style est révolutionnaire parce qu’il mêle sa personne à ses idées ; les deux choses sont liées ce qu’on ne trouve pas chez Montesquieu ou chez les autres philosophes. Même un texte plus théorique comme Du contrat social comporte des phrases fortes qui brutalisent le lecteur et le font réfléchir. Raoul Vaneigem note la force de la phrase qui ouvre le livre « L’homme est né libre et partout il est dans les fers ».
Même à l’étranger, dans de toute autre culture, il agit. Les lettrés égyptiens comme Taha Hussein ou Mohamed Heykal sont sous le charme lorsqu’ils le découvrent  vers 1920 ; les Chinois peuvent également lire la traduction du Contrat social faite par Yang Tindong vers 1900 et le mouvement romantique chinois qui va naître entre 1920 et 1930, va puiser dans Les Confessions et Les Rêveries ce qui correspond à la sensibilité nouvelle de la jeunesse qui a pris la parole en 1919, après les événements du 4 mai. Ils sont enthousiastes parce qu’ils voient en lui ce qu’ils appellent « la sincérité », cette correspondance entre la vie et l’œuvre.

Sa vie est singulière et son parcours atypique, quelles en sont les raisons ?

Tanguy L’Aminot : Ses ennemis ont voulu minimiser le complot, mais la souffrance dans l’exil, les poursuites policières, la suspicion, la haine des Encyclopédistes ont existé : il en a véritablement bavé. Il n’a pas été un philosophe de salon. Il a vécu dans des conditions financières difficiles. Lorsqu’il remporte le prix de l’académie de Dijon en 1750 il doit faire sa réforme comme il dit ; il a eu auparavant la fameuse illumination de Vincennes, un grand moment de sa vie qui lui a fait entrevoir tout son système de pensée. Sa fameuse réforme le conduit à renoncer à la fréquentation des riches et des puissants ; il renonce à réussir dans le monde, décide de vivre de son travail et devient copiste de musique dès décembre 1751. Vivre de ses mains ; cela sera le slogan de certains de ses disciples, comme les romanciers prolétariens dont Henry Poulaille et Michel Ragon sont les plus connus. Rousseau a vécu de son travail quotidien, pas comme un Voltaire qui avait des rentes et faisait des opérations financières.
Jusqu’à la fin de sa vie Rousseau a vécu modestement, même quand son œuvre lui a rapporté quelque argent. Sa fin de vie a été particulièrement difficile. Entre 1776 et 1778 il est à Paris et n’en peut plus. Son loyer a augmenté, il est vieux et fatigué, il lance un appel pour qu’on le protège et qu’on lui trouve une maison bon marché. Il finit démuni, et s’il va à Ermenonville ce n’est pas pour le paysage, mais contraint par la nécessité. Il a la protection du marquis de Girardin, tout heureux d’exhiber un philosophe dans son jardin tout en le sortant de la misère. Il n’y séjournera que quelques semaines, d’ailleurs, avant de mourir. Cela aussi va émouvoir ses lecteurs du monde entier, parce que c’est un destin qui sort du banal.

D’où vient la fascination pour le Rousseau aseptisé, représenté dans des gravures du type  » Fêtes galantes «  ?

Tanguy L’Aminot : En fait, chaque époque a créé un Rousseau à son image.

Il y a donc eu une suite d’images du philosophe ?

Tanguy L’Aminot : L’image la plus connue est le Rousseau de la Révolution française. Il y a aussi le Rousseau romantique qui a nourri Chateaubriand, Hugo, Balzac, mais s’ils ont puisé dans son style, ils l’ont rejeté sur le plan politique, considérant qu’il y a des aspects de l’œuvre et de sa vie qui ne devaient pas être retenus, comme l’abandon de ses enfants et sa vision de la religion. Au XXe siècle, il fera l’objet de belles polémiques. Déjà à la suite de la Commune, Hippolyte Taine avait désigné Rousseau comme l’un des inspirateurs des troubles sociaux qui s’étaient produits. C’est ce qu’a fait Barrès en 1912 avec la Bande à Bonnot en désignant le philosophe comme l’inspirateur des attaques commises par elle. Il y a alors un mouvement haineux fort. Le discours de Barrès, à la chambre des députés, le 11 juin 1912, qui refuse de voter les crédits pour la commémoration du bicentenaire de la naissance de Rousseau, va provoquer des manifestations violentes et importantes de l’Action française et des Camelots du roi. Une centaine d’entre eux sont arrêtés à Paris, place du Panthéon le 30 juin 1912. Cette tendance se prolongea jusqu’à la deuxième guerre mondiale. Même le régime de Vichy va apparaitre comme une suite du courant de l’Action française, la plupart de ses dirigeants étant des disciples de Charles Maurras.
La naissance de la critique moderne de Rousseau, est née après la guerre entre 1955 et 1960 avec les œuvres de Jean Guéhenno, Henri Guillemin, et évidemment Jean Starobinski ou Jean Fabre encore. Tous ces auteurs vont faire naître un Rousseau beaucoup plus académique. Avant il était un auteur pour tout le monde et il va devenir un auteur pour universitaires. Les colloques qui auront lieu en 1962 pour le 250 e anniversaire de sa naissance et le bicentenaire de la parution de Du contrat social, seront exclusivement l’œuvre d’universitaires. Rousseau

n’est pourtant pas entièrement dans le seul monde de la pensée : des partisans de l’OAS le désignent alors, par exemple, comme le responsable de la perte de l’Algérie et des colonies.

Existe-t-il des écrits précis sur ce thème ?

Tanguy L’Aminot : Des membres de l’OAS, refugiés dans le Portugal de Salazar, diffusent leur propagande sur une radio dans une émission appelée « La voix de l’Occident ». Ils publient des textes qui mettent en cause Rousseau comme étant celui qui a ouvert les portes de l’Occident aux barbares d’Afrique du Nord et d’Afrique noire. Dans le même temps les socialistes et les communistes, très puissants à l’université, écrivent plusieurs livres sur lui. Guy Besse, Jean-Louis Lecercle, Roger Barny sont parmi les plus connus. Ils écrivent à la fois des études fort sérieuses et encore valables aujourd’hui, et des textes plus partisans dans les publications du parti.

Quel est son rôle dans la contestation qui s’installe dans les années 1970 ?

Tanguy L’Aminot : Un Rousseau subversif apparait en 1968 avec de nombreux articles et ouvrages qui se réclament de lui. Un livre 1968, un bilan d’un auteur allemand, Wolfgang Kraushaar, paru en 2008, consacre un chapitre entier à Rousseau présenté comme une figure essentielle de l’époque. Il est présent dans l’aventure des hippies, dans la contestation sociale, les crèches pour enfants, dans le mouvement alternatif, écologiste, etc. Allen Ginsberg, Gary Snyder, Stephen Gaskin m’ont écrit combien il les avait influencés.
À la fin des années 1970, le mouvement punk et les Sex Pistols émergent et une revue parisienne, Façade, publie un article titré : « Je préfère le nucléaire au Rousseauisme », signé Yves Adrien qui conteste le Rousseau écologiste. Rousseau est toujours présent, il apparait dans des romans de SF comme Les Erreurs de Joenes de Robert Sheckley ou Un pont de cendres de Roger Zelazny, dans des mondes futurs et comme une figure de la contestation écologiste. En 1978, Marcel Schneider publie un Jean-Jacques Rousseau et l’espoir écologiste qui explore un thème qui aura de plus en plus de succès.
Les nouveaux philosophes, Bernard-Henri Lévy en tête lui reprochent d’être le père des totalitarismes modernes. La nouvelle droite d’Alain de Benoist considère qu’il est dépassé, parce que l’homme n’est pas bon mais mauvais, faisant appel à des courants de pensées comme ceux de Konrad Lorenz et d’autres comportementalistes pour le discréditer. Cela dit, rien n’est simple puisque la revue d’Alain de Benoît Éléments, avec son n° 143, lui rend hommage dans un dossier intitulé « Rousseau parmi nous » tout en jouant de nouveau sur les contradictions des sociétés. Un article « Rousseau et les anti Lumières » en fait une figure de la résistance aux pensées erronées des philosophes du XVIIIe siècle. « Rousseau conservateur révolutionnaire ? », est le titre d’un autre article qui montre que Rousseau présente des aspects contradictoires intéressants.

Comment percevez-vous les célébrations du tricentenaire ?

Tanguy L’Aminot : C’est un produit suisse ; en 2007 Genève a lancé un appel pour être le fédérateur des célébrations, et cela arrange finalement tout le monde et les Français en premier. L’Assemblé nationale a fait de février à avril une exposition des manuscrits remis par la femme de Rousseau à la Constituante pendant la Révolution. Est-ce l’hommage national d’aujourd’hui ? 1912 avait fait mieux. Ce qui est organisé dans l’Oise, à Ermenonville, ou en Rhône Alpes, à Chambéry en particulier l’est sous la houlette de Genève.
La célébration est consensuelle, évite les polémiques, tourne autour de la botanique, de l’animation citoyenne ou de banquets plus ou moins gastronomiques. Et la campagne électorale n’a donné lieu qu’à quelques tentatives de récupération comme celle de Jean-Luc Mélenchon qui, dans un meeting à Nantes, a évoqué le Rousseau qui défend la souveraineté du peuple par l’exigence du vote citoyen. Une manière de rappeler que le texte sur la constitution européenne repoussé par les électeurs lors d’un referendum a été validé par un simple vote du Parlement.

La citoyenneté, telle que l’entend Rousseau, est simplifiée quand on veut la récupérer ; dans toute son œuvre et en particulier dans Emile quand il s’agit de choisir entre l’éducation d’un homme et celle d’un citoyen, il opte pour la première parce qu’il n’y a plus la possibilité d’avoir des citoyens. Rousseau explique qu’on est dans la cité du faux contrat social où il n’y a pas de citoyen, parce qu’il n’y a pas de réelles délibérations. Aujourd’hui le débat sur la citoyenneté, au sens où Rousseau l’entendait, n’existe pas. Et le mot citoyen est galvaudé à tous les niveaux.

Pensez-vous que la tendance est à le simplifier parce que le personnage et son œuvre sont trop complexes ?

Tanguy L’Aminot : La tendance est d’attirer l’attention sur certains aspects de Rousseau, surtout à notre époque alors qu’il ne peut pas être contenu dans un cadre rigide ou formel. Le coté promeneur solitaire, botaniste, musicien, autobiographique permet d’éviter les questions qui fâchent. C’est un produit de l’école, des programmes scolaires qui dans les années 1990 ont donné à lire Rousseau uniquement comme le père de l’autobiographie. Et quelle idée de Rousseau donne aux lycéens une telle lecture réduite aux livres I à IV des Confessions ? Celle d’un personnage grimpé dans un cerisier balançant des cerises dans le corsage des filles, un pleurnicheur et un petit cochon qui prend du goût aux fessées. Aucun manuel scolaire ou parascolaire ne mentionne la découverte de Michel Launay qui montrait dans sa thèse sur Rousseau, écrivain politique en 1968, que Rousseau avait passé son enfance à Plainpalais, à Genève, dans un milieu de militants contestataires épris de leurs droits et que cela avait eu une importance décisive dans l’élaboration de son œuvre.
Mais cet « oubli » permet d’éviter d’aborder la pensée politique du philosophe et ce qu’elle pourrait faire naître d’idées subversives dans les jeunes cervelles. Depuis 30 ans, les élèves sont formés à ce Rousseau-là. Même chose en philosophie, où on étudie seulement deux des quatre livres du Contrat social. Les deux derniers qu’on néglige sont ceux qui disent que tout gouvernement dégénère quoi qu’on fasse, que la corruption est liée à tout pouvoir et que la représentation nationale est impossible. Les élèves n’ont que le début de l’histoire, pas la fin. Cela revient à simplifier Rousseau et à le rendre conforme à la consommation « citoyenne » du moment. Maurice Barrès, d’ailleurs, disait « J’aime bien le Rousseau de La Nouvelle Héloïse, pas celui du Contrat social »

Tanguy L’Aminot est chargé de recherche au CNRS,

Eduquer et gouverner

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Comme chacun le sait, dans le livre premier de l’Émile Rousseau distingue radicalement l’éducation de l’homme de celle du citoyen1. Cette distinction a d’abord une raison historique : la socio-genèse rousseauiste de la citoyenneté présuppose l’existence de la patrie, c’est-à-dire d’un système de relations et d’interdépendances entre les individus-citoyens et l’État. Il convient également de rappeler que les conditions de possibilité de la patrie reposent aussi bien sur un mode de vie commune, qui traduit une volonté d’existence collective, que sur la contrainte d’obéissance que le sujet doit s’imposer à lui- même. Or, écrit Rousseau, ces conditions de possibilité sont désormais obsolètes, puisque « l’institution publique n’existe plus et ne peut pas exister ».

Selon l’auteur du Contrat social, les conditions d’une proximité unifiant les citoyens dans une appartenance commune ne peuvent en effet être remplis dans les États modernes pour des raisons principalement démographiques et géo-spatiales. La société civile est donc à (re)construire sur des bases nouvelles et selon des instruments différents, parmi lesquels l’éducation. En d’autres termes, la cohésion sociale de la patrie invite désormais à mettre en place et à légitimer des mécanismes d’éducation publique qui consistent à former un nouveau modèle de citoyenneté afin de préserver l’unité de la nation.

C’est pourquoi Rousseau peut écrire, dans le 4ème paragraphe des Considérations sur le gouvernement de la Pologne : 

« C’est l’éducation qui doit donner aux âmes la force nationale, et diriger tellement les opinions et leur goûts, qu’elles soient patriotes par inclination, par passion, par nécessité. Un enfant, en ouvrant les yeux doit voir la patrie et jusqu’à la mort ne doit voir qu’elle. Tout vrai républicain suça avec le lait de sa mère, l’amour de sa patrie, c’est-à-dire des lois et de la liberté. Cet amour fait toute son existence ; il ne voit que sa patrie, il ne vit que pour elle ; sitôt qu’il est seul, il est nul : sitôt qu’il n’a plus de patrie, il n’est plus ; et s’il n’est pas mort, il est pis. » 

Il ne faut pas oublier que ce passage, contenu dans un manifeste programmatique, décrit des conditions idéales. En réalité, l’institution publique se trouve enfermée dans une sorte de cercle vicieux : pour que l’éducation soit simultanément apprentissage de la liberté et de la citoyenneté, il faudrait en effet que les institutions soient préalablement vertueuses. Or, cette exigence est difficilement satisfaite dans une société corrompue où règne l’individualisme et dans laquelle l’éducation publique est abandonnée à « ces risibles établissement qu’on appelle collèges ». Une solution consisterait alors à séparer l’œuvre du législateur (l’éducation dite publique) de celle du précepteur (l’éducation privée). L’absence de liberté dans les institutions communes imposerait en effet la nécessité de cultiver les libertés privées car, comme le rappelle le gouverneur au jeune Émile dans le livre V : « c’est en vain qu’on aspire à la liberté sous la sauvegarde des lois. […] La liberté n’est dans aucune forme de gouvernement, elle est dans le cœur de l’homme libre6 ». Ainsi, avant d’accéder au statut de citoyen, l’homme doit être éduqué en apprenant et en intériorisant les lois éternelles de la nature et de l’ordre. Remarquons que cette solution préconisée par le gouverneur rousseauiste mobilise en toile de fond un second argument d’ordre anthropologique. La progression éducative doit en effet correspondre à la marche de la nature et aux développements spontanés des facultés humaines. Avant d’initier Émile aux mœurs de la vie publique, il faut donc lui apprendre le jugement moral en lui montrant les effets de l’ordre social sur la moralité humaine7. Autrement dit, il faut lui apprendre la loi par l’exemple en développant, dès son plus jeune âge, la vertu et les sentiments de justice, c’est-à-dire la « force morale » qui lui permettra plus tard d’assumer le rôle politique qu’il sera amené à jouer au sein de la cité. 

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Exposition « Jean-Jacques Rousseau. Portraits d’une icône universelle »

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HORAIRE : Du mardi au dimanche, de 14h à 18h. Fermeture le 1er mai.

TARIF : Plein Tarif : 5€10 / Tarif Réduit : 2€60 / Gratuit : moins de 19 ans, bénéficiaires des minima sociaux, invalides et leur accompagnateur, membres de la Fédération nationale et Route des maisons d’écrivains, ICOM, SIAM JJR, conférenciers nationaux.

Jean-Jacques Rousseau est une icône universelle : illustre représentant du siècle des Lumières, ses écrits et son apparence sont connus de tous.

Mais sait-on réellement à quoi il ressemblait ?

Jean-Jacques Rousseau a été portraituré par des artistes de renom. Son image s’est diffusée par le biais de grands modèles, reflétant les moments clefs de son histoire : philosophe célèbre et admiré, auteur exilé et persécuté, puis personnalité divinisée et adulée.

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Jean-Jacques Rousseau de Maurice Quentin de la Tour.

L’iconographie de Jean-Jacques Rousseau est riche de sens et source d’une grande production artistique et littéraire. Elle investit tous les foyers, des plus fortunés aux plus modestes, et tous les supports (peintures, sculptures, gravures, horloges, médaillons, assiettes…). C’est ce qu’on pourrait appeler la « Rousseaumania » qui perdure jusqu’à nos jours.

Cette exposition révèle un homme aux multiples visages à travers une sélection d’œuvres encore jamais sorties des réserves, et enrichie de prêts du domaine de Chaalis – Institut de France. Et notre Philosophe en face de son plus fidèle ennemi au Panthéon , Voltaire.

L’exposition se poursuit dans les jardins du Musée : des anecdotes insolites racontent les dessous des portraits du philosophe.
Le jeune public peut découvrir l’exposition de manière ludique grâce à deux livrets-jeux.
Une programmation culturelle, à l’attention de tous les publics, accompagne cette exposition.

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Les Ateliers Philo sont ouverts tous les trois mois le samedi de 14h30 à 16h30  .

Retrouvez cette information sur le site de la SIAM JJR

Merci au journal « Le Parisien » pour son information. 

L’auteur du « Contrat social » et des « Confessions » est plus actuel que jamais.

5dae31d2b988f83e3a2c14bc   Les Indignés, l’écologie, la justice sociale… c’est la faute à Rousseau !

D’autant que Rousseau a pour singularité majeure de lier radicalement égalité et universalité. Il ne tolère aucun de ces philosophes qui déclament des vérités prétendument universelles en s’accommodant fort bien des injustices sociales, des autorités arbitraires, des conventions hypocrites. Ces pseudo-penseurs ne sont pour lui que hâbleurs, imposteurs et comédiens, alors que seule importe, ici plus encore qu’ailleurs, l’authenticité du cœur.

Voyant en chacun des citoyens le seul fondement de l’autorité publique, Rousseau est sans conteste le penseur le plus facile à enrôler dans les rangs de la démocratie directe, de l’autogestion et des protestations citoyennes. Il est évidemment impossible de savoir s’il aurait occupé Wall Street ou la Puerta del Sol, mais il est aisé de constater que les Indignés peuvent trouver bien des raisons de se reconnaître en lui, et imaginer que leur révolte est « la faute à Rousseau ».

Le penseur de la technique

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