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PAR JEANNE ROUDET
« Si Jean-Jacques vivait, il irait encore en prison ou en exil.
Il se trouverait encore des mains pleines de péché pour lui jeter des pierres,
et des âmes pleines d’amour pour le consoler. »
George Sand, préface aux Confessions (1841)
Dans le rapport présenté par Chénier à la Convention le 28 juillet 1795 (10 Thermidor – III) pour défendre la cause de ceux qui demandent la création du Conservatoire de musique, Rousseau est le seul philosophe nommément cité. Voici comment il est évoqué :
Ce sage et sublime écrivain, qui a prouvé, par tant d’ouvrages, que l’éloquence est l’arme la plus puissante de la raison, et que la sensibilité n’exclut point la profondeur philosophique, Jean-Jacques Rousseau, après avoir adoré toute sa vie cet art enchanteur, auquel il a dû même quelque succès, Jean-Jacques Rousseau, dans sa vieillesse, soupirait encore ses simples romances, qu’on ne peut chanter sans être attendri, et qui portent dans l’âme doucement émue, la mélancolie qui tourmentait ses derniers jours.1
L’exercice de la pensée est liée chez Rousseau à son génie littéraire – à cette « éloquence » qui lui a été si souvent reprochée – et à une connaissance intime de la musique pratiquée sous ses deux versants complémentaires, la composition et l’exécution – vocale ou au clavier comme l’attestent les Confessions ou la Correspondance. C’est sans doute cette alchimie subtile qui parle aux musiciens et leur rend accessible un édifice conceptuel d’une grande complexité. Mais c’est aussi l’acuité avec laquelle Rousseau définit son objet qui fait mouche chez les hommes de l’art :
Les Musiciens lisent peu & cependant je connais peu d’Arts où la lecture & la réflexion soient plus nécessaire. J’ai pensé qu’un Ouvrage de la forme de celui-ci serait précisément celui qui leur convenait, & que pour le leur rendre aussi profitable qu’il était possible, il fallait moins y dire ce qu’ils savent, que ce qu’ils auraient besoin d’apprendre. 2
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