1 réflexion à propos de “ Le transfert des cendres de Jean-Jacques Rousseau d’Ermenonville au Panthéon ”
Régine Belleya dit:
Comme toujours, ce ne fut qu’un malentendu, un regrettable malentendu entre les notables représentants d’un peuple qui reconnaissent leurs torts et le Génie désigné comme tel, post mortem, donc trop tard. On peut bien décorer le char d’un bosquet de verdure pour faire nature. On peut bien mettre en scène le bassin des Tuileries et le transformer pour l’occasion en lac de Neufchâtel. On peut bien fêter, célébrer l’homme devenu soudain grand sous couvert de liesse populaire ou de silence respectueux ! Comme Jean Jacques aurait détesté ces fades conversations autour de lui et cette gloriole superfétatoire à son passage, inerte. Charles Rowe nous a conté le voyage inouï d’Ermenonville au Panthéon via Montmorency, avec les cohortes d’un peuple gorgé de reconnaissance certes mais à mon sens, bien plus bourré de remords et de regrets inavoués.
N’occultons pas Motiers et la lapidation où ces mêmes personnes, le village à petite échelle, – si ce n’était lui, c’était donc son frère – ont porté haut les stigmates de l’intolérance. Et même si les gros cailloux dans les vitres n’étaient – selon certains incrédules – que du gravier dans l’allée du jardin, je ne veux considérer comme vérité que la Confession de celui qui était présent. C’était peu que de tenter d’effacer toutes les souffrances que Rousseau a supportées pendant des décennies au nom de la mise à mort d’un être différent qui fut contraint de construire sa plaidoirie pour devoir être jugé innocent.
Ayons aussi en mémoire tous « ces Messieurs », ceux là même qui hurlaient avec les loups contre celui qui ne faisait qu’écouter son cœur, sans porter ombrage à qui que ce soit. Qu’on n’oublie pas non plus l’indifférence des badauds dans Paris, lors de l’accident du 24 octobre 76 : parce que Rousseau en était la victime, tous, sans compassion, fiers comme des paons, passèrent leur chemin. En ce 11 octobre 94, ils ont l’air fin à porter au pinacle du Panthéon la Lumière incomprise de son siècle. Il pouvait bien y avoir unité de pensée, ces trois petits jours là, pour réparer les dommages collatéraux et prendre conscience qu’il n’est jamais trop tard pour avouer qu’on a longtemps eu tort. « Tout ce qui est excessif est insignifiant » énoncera Talleyrand. Oui l’arrivée triomphale entre Ermenonville et Paris fut excessive. Sûr qu’il aura préféré, en pleine fleur de sa jeunesse, celle qu’il s’octroya sans protocole, en chaise à porteur jusqu’au Procope, le jour de la représentation du Devin du Village devant le Roi. Pour Hugo, Zola, Jaurès ou Dumas, j’ose espérer qu’on a dû faire plus simple. L’essentiel est que sa place au Panthéon ressemble désormais à son jardin d’Eden à Clarens.
Comme toujours, ce ne fut qu’un malentendu, un regrettable malentendu entre les notables représentants d’un peuple qui reconnaissent leurs torts et le Génie désigné comme tel, post mortem, donc trop tard. On peut bien décorer le char d’un bosquet de verdure pour faire nature. On peut bien mettre en scène le bassin des Tuileries et le transformer pour l’occasion en lac de Neufchâtel. On peut bien fêter, célébrer l’homme devenu soudain grand sous couvert de liesse populaire ou de silence respectueux ! Comme Jean Jacques aurait détesté ces fades conversations autour de lui et cette gloriole superfétatoire à son passage, inerte. Charles Rowe nous a conté le voyage inouï d’Ermenonville au Panthéon via Montmorency, avec les cohortes d’un peuple gorgé de reconnaissance certes mais à mon sens, bien plus bourré de remords et de regrets inavoués.
N’occultons pas Motiers et la lapidation où ces mêmes personnes, le village à petite échelle, – si ce n’était lui, c’était donc son frère – ont porté haut les stigmates de l’intolérance. Et même si les gros cailloux dans les vitres n’étaient – selon certains incrédules – que du gravier dans l’allée du jardin, je ne veux considérer comme vérité que la Confession de celui qui était présent. C’était peu que de tenter d’effacer toutes les souffrances que Rousseau a supportées pendant des décennies au nom de la mise à mort d’un être différent qui fut contraint de construire sa plaidoirie pour devoir être jugé innocent.
Ayons aussi en mémoire tous « ces Messieurs », ceux là même qui hurlaient avec les loups contre celui qui ne faisait qu’écouter son cœur, sans porter ombrage à qui que ce soit. Qu’on n’oublie pas non plus l’indifférence des badauds dans Paris, lors de l’accident du 24 octobre 76 : parce que Rousseau en était la victime, tous, sans compassion, fiers comme des paons, passèrent leur chemin. En ce 11 octobre 94, ils ont l’air fin à porter au pinacle du Panthéon la Lumière incomprise de son siècle. Il pouvait bien y avoir unité de pensée, ces trois petits jours là, pour réparer les dommages collatéraux et prendre conscience qu’il n’est jamais trop tard pour avouer qu’on a longtemps eu tort. « Tout ce qui est excessif est insignifiant » énoncera Talleyrand. Oui l’arrivée triomphale entre Ermenonville et Paris fut excessive. Sûr qu’il aura préféré, en pleine fleur de sa jeunesse, celle qu’il s’octroya sans protocole, en chaise à porteur jusqu’au Procope, le jour de la représentation du Devin du Village devant le Roi. Pour Hugo, Zola, Jaurès ou Dumas, j’ose espérer qu’on a dû faire plus simple. L’essentiel est que sa place au Panthéon ressemble désormais à son jardin d’Eden à Clarens.